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Délire d'un revenant

24 Septembre 2013

         Année zéro, dans les limbes lumineuses d’un Eden illusoire, mon âme est renvoyée sur terre sans ménagement par mes frères ailés jugeant insatisfaisantes mes prestations antérieures. Il y a encore du taf qu’ils m’ont dit, et c’est toi qui t’y colle. Que nenni leur répondis-je, vous avez vu le chantier que c’est en bas ? Mais à peine avais je énoncé cette inutile remarque que déjà, la spirale de la vie me projeta en position fœtale dans une matrice maternelle choisit pour la circonstance. Salut Gaïa et bonjour la galère !...

         Terre, merveilleuse planète bleue de quinze milliards d’années et des poussières, peuplée de bientôt neuf milliards de paumés qui tournent en rond, se piétinent, s’ignorent ou se massacrent en cherchant la sortie… Au départ c’était un fabuleux jardin. Enfin, lorsqu’elle est devenue habitable car, par la suite cela a dégénéré et depuis le début du vingtième siècle jusqu’à ce jour, ça commence à sérieusement sentir le sapin pour ce satellite solaire.

         Il faut croire en l’homme qu’ils m’ont dit. Avoir foi en une collectivité peuplée d’individualité, c’est comme croire à la conversion au végétarisme d’un convoi de caïman se baignant dans la même rivière qu’une école primaire de sénégalais. Il paraît que la foi soulève ou déplace des montagnes, en ce qui me concerne, regardant le monde qui m’entoure j’avoue que la mienne, bien que convaincue de l’avant comme de l’après, a dû mal à imaginer une issue favorable à ce grand bordel organisé par les politiques et les financiers de ce monde.

         Le but de ces ostrogoths ignorants n’est pas la recherche d’un monde meilleur pour la majorité, mais l’instauration d’une dictature au service de leurs intérêts particuliers avec en bonus la destruction de notre environnement. Ils ne sont pas sérieux car à bien y réfléchir, l’enrichissement matériel individuel sans limite est la quintessence même de la bêtise car, ce que l’on acquière par envie, une fois possédé détruit l’envie pour en créer irrémédiablement d’autres. C’est un cercle vicieux et sans fin. Est pauvre celui qui ne peut assouvir les envies qu’il se crée et riche celui qui du seul nécessaire peut se satisfaire. Courir sa vie à user sa santé pour s’enrichir et, en fin de celle ci dépenser ses richesses pour retrouver cette même santé sans avoir vécu, avouez qu’il est difficile de faire plus stupide. 

         Finalement, après plusieurs tours de manège gratuit sur l’orange d’Eluard, j’ai la nausée qui me gagne, une profonde lassitude et une forte envie de déplumer tous

les volatiles célestes qui passent à ma portée. Alors quoi ? En apparence, la vie n'a aucun sens, et pourtant, il est impossible qu'il n'y en ait pas un ! Donc comme à chaque fois, je me suis posé la fameuse question existentielle : « Qu’est ce qu’on est venu foutre ici ? »

         A première vue, nous ne sommes pas venu là pour emmagasiner des boites à coucou dans des placards, ni pour remplir des parkings avec des voitures de sport du style : « J’en ai une plus grosse que la tienne », ni pour empiler des billets de banque jusqu'à ne plus voir la tête de ses voisins, ni collectionner les conquêtes des deux sexes, moches ou belles, afin d’assouvir une libido infantile et débridée version DSK (Désolé, je n’ai pas pu m’en empêcher…)

         Cependant, je ne pense pas qu’il soit absolument nécessaire de vivre comme un ermite, un ascète mais peut-être, éventuellement, rechercher un équilibre entre matérialité et spiritualité. Pour matérialité, nul besoin d’explication, c’est le monde de la consommation dans lequel nous vivons, le saint Graal des économistes. Par spiritualité, je ne fais pas référence à une religion ou même une croyance quelconque mais, à une harmonie entre le corps et l’esprit et son milieu naturel. A une écoute de soi, des autres et de la nature qui nous entoure, à la recherche d’un équilibre écologique global. Arrêter d’être toujours tendu vers l’avenir ou en regret dans le passé afin de vivre pleinement les instants présents. Reclasser les priorités sur leurs valeurs réelles, l’environnement, la famille, les amis, les voisins, écouter son corps et son âme, prendre soin de soi…

         Ne sommes nous pas là pour apprendre à vivre en harmonie avec tout ceux qui nous entourent ? Je sais, Le verbe aimer est difficile à conjuguer, son passé n’est pas simple, son présent n’est qu’indicatif et son futur toujours au conditionnel. Cela dit, n’oublions pas que les biens matériels acquis ne seront d’aucunes utilités sous la stèle ou au crématorium et seul, ce que nous avons été et ce que nous avons appris pourrait être le trésor d’une éventuelle suite dans un ailleurs futur.

         C’est donc un pari sur l’avenir et, je vous propose d’étudier celui-ci : « Croyez qu’il y a un après, que rien ne se crée et que rien ne se perd mais que tout se transforme. Si le moment venu cela s’avère faux et que tout s’arrête, alors vous ne serez pas plus déçu et vous n’aurez rien perdu mais, si cela continue alors, tout ce que vous aurez fait de bien n’aura pas été en vain … » C’est le pari de Pascal mais sans le Dieu et les règles d’une institution religieuse, une version light, une façon d’être positif. Soyez joueur !

         Le poète a écrit : « Parce que j’ai cru en la lumière au cœur de l’hiver, j’ai découvert un éternel été ». C’est une façon sympathique de dire qu’il faut essayer de toujours garder espoir pour la suite…

         Salutations à tous les galériens, frères d’infortune et compagnons de séjours terrestres, auxquels on a temporairement coupé les ailes et bonne route à tous !…

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